La récente publication de la Condition littéraire :
la double vie des écrivains
de Bernard Lahire a ravivé ces dernières
semaines un vieux débat sur la façon dont les écrivains – et les
auteurs de
livre en général – pouvaient être « exploités » par l’ »industrie
de l’édition. Quand on sait en effet que la plupart des grandes maisons
appartiennent désormais à des groupes qui sévissent par ailleurs dans
les
médias, l’armement ou que sais-je encore, on ne peut plus parler en
effet d’artisanat
mais bien d’industrie. Or, l’écrivain se trouve dans cette situation
unique en
son genre, de faire vivre par son travail tout un pan de l’économie
culturelle,
et de ne pouvoir lui-même en vivre. 99,99% des écrivains, vivent d'une
autre activité : journaliste, prof, informaticien, élu, etc. Les
auteurs qui parviennent à se nourrir grâce
à leur seul « travail » d’écriture de livres se comptent en maigres
poignées, sous nos latitudes… Autant dire que les jérémiades
continuelles des
intermittents du spectacle font sourire un peu jaune les professionnels
de l’écriture,
qui n’ont pour leur part aucun système équivalent pour les sponsoriser
même si la
plupart d’entre eux sont assez fair play pour soutenir le combat de
leurs
confrères du cinéma, du théâtre ou de la musique.
Cette situation est particulièrement flagrante et douloureuse en France où les % rétrocédés aux auteurs sont parmi les plus faibles au monde (jusqu’à deux fois moins importants que dans les pays anglo-saxons, en moyenne 7 à 8%* contre 12 à 15% en Angleterre ou aux Etats-Unis) et où, surtout, l’opacité qui règne chez les éditeurs sur les chiffres de vente et le calcul des droits est à peu près totale aux yeux des principaux intéressées… les auteurs !
L’objet de cette note n’est pas pourtant de faire pleurer Margaux (même si vous vous appelez Mireille ou Bernard). Non je voulais simplement vous annoncer l’initiative courageuse d'un dénommé François Vignes qui vient de créer L’agence des droits à la hauteur, par l'intermédiaire de son blog éponyme. Au-delà du jeu de mots plaisant, il y a la volonté de créer, avec le temps, un véritable front uni des auteurs faces aux scandaleuses conditions qui leurs sont parfois imposées…
Hélas, tous ceux qui ont déjà été en situation de conflit avec un éditeur à ce propos, savent que les moins scrupuleux d’entre eux n’hésitent non seulement pas à spolier les auteurs de leurs droits, mais s’adonnent hélas à ce que l’on pourrait qualifier de dumping intellectuel : un auteur n’est pas satisfait des conditions qu'on lui propose ? Ils s’en trouvera toujours un bataillon d’autres aussi talentueux pour frapper à ma porte et accepter MES conditons…. Déplorable, mais courant.
Alors, mission impossible, l'entreprise de François ? Time will tell…
* Entre le % du libraire et la part absorbée par le diffuseur-distributeur, reste à l’éditeur entre 40 et 50%, dont 7 à 8% (jusqu’à 10 ou 12% pour les « divas ») pour l’auteur. Avec les 30 à 40% qui lui restent, l’éditeur doit payer le travail d’édition, de correction d’impression et de promotion du texte en question.
FP
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